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Ça pourrait t’arriver à toi aussi!
Lettre ouverte publiée dans le Journal de Montréal, vendredi 14 juin 2024.
La santé mentale n’est pas une priorité au Québec malgré que 40% des consultations médicales la concernent. La CAQ mentionne nulle part les mots « santé mentale » dans son projet de loi 15 visant à rendre son système de santé plus efficace. Les victimes sous le régime d’Indemnisation des Victimes d’Actes Criminels (IVAC) ont besoin des services en santé mentale..
Monsieur le ministre, vous répétez que nous sommes «au cœur de vos décisions». Moi et d’autres indemnisés tentons de nous faire entendre depuis des mois. L’écoute et l’empathie vous font cruellement défaut. Ayant participé au rapport “ Rebâtir la confiance “, nous sommes tellement déçues ! Nous nous heurtons à un mépris total de votre part.
Vous avez décidé de cesser les indemnités de milliers de victimes parce qu’elles ne se sont pas rétablies dans votre délai de 3 ans. On ne guérit pas d’événement traumatisant, on y survit. Spécialistes de trauma s’entendent sur l’unicité des cas et qu’aucun délai n’est prévisible pour se rétablir. Aucunes données scientifiques confirment votre délai fixé.
Connaissez-vous IVAC (programme d’indemnisation pour les victimes d’actes criminels) et ce qu’il y arrive comme catastrophe ? Ce régime pour les victimes d’actes criminels et leurs proches a déjà commencé à couper les indemnités de remplacement de salaire (90 % du salaire net) à de nombreuses victimes. Pour le ministre Simon Jolin-Barrette qui se dit fier de sa réforme de 2021, 3 ans est suffisant pour se remettre physiquement et psychologiquement d’un acte criminel, peu importe lequel.
Aucune donnée scientifique ne confirme que la durée de guérison d’un stress post-traumatique est de 3 ans est un état réel pour des milliers de victimes. Tous les spécialistes du trauma s’entendent pour dire que chaque cas est unique, et qu’il n’y a aucun délai prévisible pour guérir, si on en guérit. Ce délai est irréaliste et saugrenu pour la majeure partie d’entre nous.
Il n’y a pas que le ministre de la Justice qui devrait être concerné par IVAC; les victimes sont aussi prises dans un engrenage très périlleux pour tenter de guérir. Que dit le ministre de la Santé et celui des services sociaux ?
Avoir ou trouver un médecin. Vous engorgerez le système de santé souvent, car IVAC demande un rapport de votre médecin aux 3 mois demandés par IVAC. Des tests et des spécialistes, des mois et des mois d’attente (peut-être en années) pour une possible guérison physique.
Trouver un psychologue. Ils sont en pénurie, encore plus ceux qui acceptent les patients de IVAC. Ils doivent remplir un rapport après un certain nombre de séance, ils sont payés par IVAC a un coût moindre que d’autres et en plus, IVAC se permet de les payer 3 à 6 mois après le travail fait.
Il est évident qu’à 90 % du salaire, les victimes sont déjà en situation d’appauvrissement. Mais, ce n’est pas grave ça non plus, une victime c’est courageux. Comme le dit le premier ministre, tournez-vous vers la solidarité ou l’aide sociale. Parce qu’une victime d’acte criminel, ça ne vaut que ça. N’est-ce pas du droit fondamental de se loger, base même d’une bonne santé mentale ? Ce sont des propos humiliants pour des personnes qui ont vécus de nombreux préjugés tout au long de leurs parcours.
Cher ministre, vous avez rallumé cette sensation d’étouffement que toute victime tente de faire taire et rallumer cet instinct de survie que toute victime tente de calmer. Depuis le mois de février 2024, non seulement vous entacher le processus de guérison de milliers de victimes, mais vous faites aussi reculer les pas franchis.
J’ajoute ma grande déception envers tous les organismes travaillant avec les victimes d’actes criminels et de violence conjugale. Ne pas intervenir pour nous en public ou en coulisses est une grande forme de mépris. Nous avons contactés une longue liste d’organismes, d’ordre professionnel, de journalistes, de politiciens. Nous avons même essayés des artistes qui ont déjà pris la parole pour les causes sociales. Aucun n’a ouvert la bouche à ce jour pour nous. Vous rappelez des sifflets à la fin du documentaire La parfaite victime? Nous avons sifflés encore et encore jusqu’à en perdre haleine. Par contre, tout le monde déchirera sa chemine lors du prochain féminicide ou du thème de l’augmentation de la violence à Montréal.
Il y a une grande détresse chez les employés de IVAC, oui et leurs droits sont médiatisés par leur syndicat. Certaines victimes sont tellement découragées qu’elles pensent au suicide. Nous n’avons aucun syndicat nous, pour défendre nos droits, mais de la façon dont cette loi est formulée, nous n’avons aucun recours.
Personne n’est à l’abri et ne choisit d’être victime d’un acte criminel. Votre système de justice et l’IVAC pourront se clamer d’avoir achevé la part de nous qui a survécu.
Myrabelle Poulin et Danielle Hudon
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